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L'histoire acadienne, au bout des doigts

Historique de Pisiquit Version imprimable

À l’extrémité est de la baie de Fundy se trouve le bassin des Mines, une région qui, avant la déportation de 1755, était constituée de quelques établissements acadiens importants tels que Grand-Pré, Pisiguit, Cobéquid, etc. C'est durant les années 1680 à 1682 que de jeunes colons décidèrent de quitter Port-Royal et c’est ainsi que Grand-Pré fut fondé. Ce lieu, marqué par une terre parfaite pour l’agriculture et par une tranquilité due à la distance de Port-Royal (qui était souvent menacé par les Anglais), réussit à attirer plusieurs jeunes adultes de Port-Royal prêts à fonder leurs propres familles.

Suite à une croissance rapide de la population de Grand-Pré, certains colons s’éloignèrent le long de la rivière Pisiguit et s’installèrent pour fonder un village qui finit aussi par porter le nom de Pisiguit (maintenant connu comme Windsor). Selon un recensement de 1732, ce nouveau village était situé à une distance de 6 lieues du Port-Royal. Toutefois, comme une lieue équivaut environ 4 km, la distance devrait être plus près de 30 lieues.

La vie des Acadiens à Pisiguit, pour au moins un demi siècle, fut prospère. Grâce à des recensements, on est maintenant capable de suivre l'évolution de cette population acadienne remontant à si longtemps.

En premier lieu, un recensement de 1671 n’indique aucun Acadien au bassin des Mines. Ensuite, 188 personnes, formant 33 familles, sont comptées en 1701 à Pisiguit, et le nombre double presque pour atteindre 351 personnes (56 familles) en 1714. À peine 23 ans plus tard, en 1737, la population de Pisiquit s’élève à 1623. Ce nombre était composé de 168 hommes, 161 femmes, 749 garçons et 545 filles. Cependant, vers 1750, on s’aperçoit que la tendance s’inverse (pour des raisons discutées plus bas) ; le nombre d’habitants diminue entre 1400-1500.

Les habitants de Pisiguit se trouvaient dispersés le long des rivières. Selon les observations de Charles Morris, la rive gauche de cette région était la plus peuplée, ayant environ 800 personnes, venait ensuite la rivière Sainte-Croix, avec 500 personnes, et finalement la rive droite avec environ 100 habitants.

Un recensement plus détaillé de 1701 nous donne davantage d'information au sujet du style de vie à Pisiguit. Pour une population de 188, on trouvait 29 fermiers ayant du bétail. De ce nombre, 13 comptaient de 11 à 25 vaches, 11 en possédaient 5 à 10, et 5 n’avaient 4 vaches ou moins (total du bétail pour la région = 283). De plus, cent quatre-vingt dix-neuf arpents de terre étaient cultivés; la plupart des fermiers (19 sur 28) cultivaient 5 à 10 arpents chacun. Bien qu’il y avait plusieurs fermiers à Pisiguit, d'autres métiers sont aussi notés tels que des caboteurs, un tailleur et laboureur, des chirurgiens, un maçon et un potier.

En 1710, seulement quatre églises étaient situées au bassin des Mines. Le village de Pisiguit comptait à lui seul deux paroisses. Toutefois, elles ne furent pas fondées en même temps. La première à apparaître était celle de Sainte-Famille, le 8 août 1698, sur la rive est. Les gens vivant sur la rive ouest devaient alors traverser la rivière pour aller à l'église. Bien sûr, ce trajet jusque de l'autre côté de la rivière n'était pas tellement commode, mais ce n'est que quelques années plus tard que la paroisse de Notre-Dame-l'Assomption fut fondée sur l’autre rive. Un seul prêtre était responsable pour deux paroisses alors il devait changer de rive à chaque dimanche. Pendant les années juste avant la déportation (1752 à 1755), Le maire était le curé de Pisiguit.

Les registres paroissiaux de mariage montrent que, de plus en plus, les gens du bassin des Mines commencaient à chercher leur époux/épouse à l’extérieur des paroisses de leur propre village. Un registre appartenant à la paroisse Saint-Charles de Grand-Pré indique qu’en fait, parmi 164 mariages, 29 étaient constitués d'un partenaire de Grand-Pré et de l'autre issu d'une des deux paroisses de Pisiguit.

Les maisons de Pisiguit, comme celles des villages voisins, devaient être construites selon les ressources disponibles. C’est pourquoi la grande majorité était fait d'une charpente en bois et comportait peu de pièces et de meubles. Les maisons possédaient une cheminée également charpentée de bois, mais qu'on couvrait d'argile à l'intérieur.

Alors, qu'est-ce qui fit de Pisiquit une région si florissante? D'abord, il faut considérer l’effet de l’âge des colons. Comme plusieurs des nouveaux venus étaient jeunes, ils furent capables d'engendrer des familles nombreuses. Aussi, la production de blé était abondante, une grande quantité de bons marais étaient disponibles pour l’agriculture, les rivières étaient pleines de poissons et le bétail était nombreux. En fait, pour renforcer l'idée que les Acadiens profitaient d’un bon niveau de vie, ce peuple possèdait le taux de mortalité infantile le moins élevé du monde occidental.

Malheureusement, Pisiguit n’a pas su rester prospère. Comme celui-ci était le village acadien le plus près d'Halifax, ses habitants étaient les premiers choisis par les Anglais pour le difficile travail de construction des chemins. De plus, ils devaient souvent prendre le blâme des attaques perpétrées par les Amérindiens. C'est donc peu surprenant que lorsque les frictions avec les Anglais augmentaient, plusieurs Acadiens quittaient leur village.

Une marque de la présence britannique, encore en partie visible à ce jour à Pisiguit , est celle du fort Édward qui était sous le commandement du capitaine Alexandre Murray. Il fut construit en 1750 pour assurer la surveillance des Acadiens et pour contrôler le passage des bateaux voulant atteindre la baie de Fundy. C'est à ce fort que, le 5 septembre 1755, les Acadiens ont dû se rassembler pour apprendre les événements qui allaient mener à leur déportation. L'embarquement de 1066 habitants de Pisiguit sur quatre navires, le Neptune, le Three Friends, le Dolphin et le Ranger, se déroula le 13 octobre, mais ce n'est que le lundi 20 octobre qu'ils quittèrent le bassin des Mines. Suite à ce désastre, les Anglais mirent le feu aux maisons du village pour s'assurer que ceux qui avaient réussi à s'échapper n'auraient pas de maisons auxquelles ils pourraient retourner.

Le 19 novembre 1775, 156 habitants de Pisiguit arrivèrent à Philadelphie en Pennsylvanie, et d'autres encore, en décembre (sans doute, Philadelphie n'était pas le seul lieu de débarquement). Il est aussi intéressant de noté que parmi les premiers Acadiens arrivés en Louisiane, la plupart étaient de Pisiguit et de Beaubassin.

Ce peuple n'a jamais reçu la permisson de rebâtir le village de Pisiguit, mais nous le savons bien, certains se sont installés dans divers coins des Maritimes pour recommencer leur vie.



Bibliographie
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texte: http://epe.lac-bac.gc.ca/100/205/301/ic/cdc/neo-ecossaise/fr/historique/pisi.htm

Dernière mise à jour : ( 10-08-2008 )
 
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