CyberAcadie
L'histoire acadienne, au bout des doigts
Menu de CyberAcadie
Accueil |
Histoire acadienne |
Les Acadiens |
Bibliothèque |
Sites Web acadiens |
Plan du Site |
Daniel d’Auger de Subercase (Gouverneur de 1706 à 1710) |
AUGER DE SUBERCASE, DANIEL D’, capitaine de compagnie et major des troupes au Canada, gouverneur de Plaisance (Placentia) puis d’Acadie. Fils de Jourdain et de Marie ou Madeleine de Boyrie. Né à Orthez le 12 février 1661, baptisé au temple protestant d’Orthez et décédé à Cannes, dans l’Yonne le 20 novembre 1732. Le nom originel de cette famille était Dauger, transformé plus tard en d’Auger. Jean Dauger, riche marchand et bourgeois de Nay en Béarn, fit l’acquisition de plusieurs terres nobles, dont l’abbaye laïque de Subercase près d’Asson. Il fut anobli à ce titre le 6 juillet 1616 et siégea aux États de Béarn. Ses deux fils, Jean et Jourdain, héritèrent de ses domaines. À son arrivée à Plaisance, Subercase trouva l’établissement dans un piteux état. Joseph de Monic, administrateur intérimaire depuis cinq ans, avait entretenu de nombreuses querelles avec ses officiers. Les pieux et les plates-formes du fort étaient pourris et les remblais s’écroulaient sous l’action de la mer. La garnison de 150 hommes était mal recrutée, mal armée, mal logée et plusieurs soldats désertaient chez l’ennemi. La population civile manquait régulièrement de vivres et de marchandises, en plus de subir l’exploitation des marchands. La première préoccupation de Subercase fut de mettre la colonie en état de défense. En août 1703, quelques semaines après son arrivée, Plaisance échappa de justesse à un siège. Deux navires anglais vinrent d’abord croiser au large. Subercase put rappeler les pêcheurs français à temps; seuls quelques vaisseaux et le poste de Saint-Pierre furent pris. Grâce à une incursion contre Forillon (Ferryland), il obtint des prisonniers et apprit d’eux qu’une flotte de 33 voiliers réunie à Saint-Jean sous le commandement de l’amiral John Graydon, avait mission d’attaquer le poste français. De fait, le 24 août, trois navires venaient mouiller devant le Petit Plaisance, mais l’équipage d’un navire malouin capturé par les Anglais les avertit que la place était prête à résister. Ces navires n’osèrent attaquer et se contentèrent de guetter les bateaux de pêche. Finalement, l’arrivée de deux navires de guerre français, le Juste et le Hasardeux, les persuada de s’éloigner. Soulagé, Subercase s’occupa aussitôt de consolider ses positions. Par des mesures énergiques, il améliora l’existence et le moral des soldats. Pendant l’hiver, avec le concours des habitants et à l’aide de matériaux trouvés sur place, il fit refaire les fortifications et les protégea par une digue. Il se préoccupa aussi du ravitaillement en implantant la culture des céréales afin de pouvoir élever et nourrir des volailles, brebis et bestiaux. Il fit dessécher un marais et y établit des jardins potagers où il récolta des légumes pour nourrir les habitants. Ces ressources, ajoutées aux fruits de la pêche, pouvaient suppléer en partie à l’insuffisance des approvisionnements venus de France. Cette expédition assura un peu d’aisance à la colonie. Les prisonniers anglais fournirent aux pêcheurs une main-d’œuvre appréciée et le moral des troupes s’améliora. Subercase, aidé par des maçons venus de France, fit reconstruire une partie du fort en pierre. Il encouragea aussi l’organisation d’équipages corsaires formés de Canadiens, de jeunes aventuriers de Plaisance et de Micmacs venus du Cap-Breton. Ces partis harcelèrent les établissements anglais, tant sur mer que sur terre. Le nouveau gouverneur aborda à Port-Royal (Annapolis Royal, N.-É.) le 28 octobre. Par son attitude conciliante, il créa une excellente impression sur Simon-Pierre Denys de Bonaventure, administrateur de la colonie, et sur Mathieu de Goutin, mais il trouvait le pays dans un état misérable. On manquait de tout et il dut faire acheter secrètement à Boston des bas et des souliers pour les officiers. Afin de subvenir à ses besoins et à ceux de l’administration, il emprunta 1 000ª et fabriqua pour 6 000ª de monnaie de carte. Le fort, rongé par les pluies, s’éboulait en trois endroits. L’esprit de chicane régnait dans la population et la garnison, tandis que les Anglais menaçaient constamment la colonie par leurs navires corsaires et leurs vaisseaux de guerre, croisant en maîtres à proximité des côtes. Reprenant les idées de Brouillan et de Bonaventure, Subercase proposa de peupler la côte de l’est, d’y bâtir un fort puissant et d’y transporter la capitale. Il demanda des présents pour les Indiens et la nomination de l'officier français Bernard-Anselme d’Abbadie de Saint-Castin pour les commander. Au cours de l’automne, il fit réparer les fortifications, achever la frégate la Biche et demanda un équipage et des troupes à Québec. Au printemps suivant, Vaudreuil lui envoyait 60 Canadiens, matelots et soldats. Ce renfort survenait à point, car le 6 juin (26 mai, ancien style), lendemain de son arrivée, le colonel John March arrivait de Boston à l’entrée du bassin de Port-Royal avec une vingtaine de navires et 1600 hommes. Leur supériorité numérique permettait aux assaillants d’espérer une victoire facile, mais le gouverneur organisa vigoureusement la défense : il appela tous les habitants au fort, envoya plusieurs détachements harceler l’ennemi et dirigea lui-même plusieurs sorties. Au cours de l’une d’elles, il eut son cheval tué sous lui. Ces escarmouches causèrent des pertes assez sérieuses aux ennemis. Ils avaient cependant établi des retranchements et le 16 juin ils tentèrent un assaut que l’artillerie du fort arrêta. En même temps, Saint-Castin, à la tête d’un parti de 35 hommes, habitants et Abénaquis, réussit à faire tomber dans une embuscade une troupe occupée à brûler des maisons et tua 10 ou 12 hommes. Cette intervention, s’ajoutant à la rumeur d’un fort rassemblement de 300 à 400 habitants et d’une centaine d’Indiens, acheva d’enlever tout courage aux assiégeants. Ils regagnèrent leurs navires et levèrent l’ancre. Les assiégés n’avaient eu qu’un seul tué et quelques blessés. Les assaillants avaient perdu 40 à 50 hommes, mais ils avaient causé des dégâts importants en incendiant beaucoup de maisons, en tuant les bestiaux, en arrachant les blés et les plantations. L’automne suivant fut plutôt pénible à Port-Royal. Les deux sièges avaient ruiné un bon nombre d’habitants, pour lesquels le gouverneur réclama en vain une indemnité. Le navire d’approvisionnement la Loire n’apporta aucune marchandise. Le gouverneur dut donner ses draps et ses chemises aux malades et vendre sa vaisselle d’argent pour payer les réparations du fort. En 1708 et 1709, la France, éprouvée par des revers en Europe, ne put envoyer aucun renfort sérieux : les nouvelles recrues n’étaient que des adolescents, les deux tiers des fusils crevaient entre les mains, les soldats et les officiers ne recevaient plus leur solde. Subercase sut heureusement obtenir le concours des corsaires de Saint-Domingue, surtout de Pierre Morpain, qui apportèrent des vivres, étoffes et munitions à Port-Royal. Saint-Castin et le gouverneur lui-même armèrent des navires pour le pillage et réalisèrent plusieurs prises. Cela provoqua des représailles et un gros raid, mené du Canada, sous la direction de Jean-Baptiste Hertel de Rouville, alarma encore les colonies anglaises. Samuel Vetch et Francis Nicholson allèrent en Angleterre demander des secours et ils furent bien accueillis. Subercase, prévoyant de nouvelles attaques, demanda aussi assistance en France. Le ministre lui répondit que les finances étaient épuisées et que «le roi abandonnerait la colonie, si elle continue d’être autant à sa charge.» Habitants et soldats eurent l’impression d’être abandonnés par Louis XIV qui ne payait même plus ses dettes. Le mécontentement et la discorde se répandirent à nouveau. Les membres du clergé et les officiers dénoncèrent le gouverneur à la cour, l’accusant d’imposer son arbitrage dans le règlement des procès, d’abuser de son autorité, de tolérer le libertinage et l’abus des boissons enivrantes. De son côté, Subercase se plaignait de ses officiers : l’un des capitaines était un faible d’esprit, un deuxième avait nettement perdu la raison, d’autres étaient malhonnêtes ou négligents, l’ingénieur était un excentrique et le gouverneur déclarait qu’il aurait «autant besoin de petites maisons que de casernes». Une épidémie de fièvre pourprée décima Port-Royal et vint achever d’abattre le moral de la population. C’est dans ces circonstances que la flotte du général Francis Nicholson parut devant Port-Royal le 5 octobre 1710. Elle comprenait 2 000 hommes de débarquement (3 400 d’après Subercase), formés d’un régiment de réguliers anglais et de quatre régiments de miliciens, levés par le Massachusetts, le Connecticut, le Rhode Island et le New Hampshire. Ils étaient montés sur 36 vaisseaux, dont sept navires de guerre. Subercase avait moins de 300 hommes à leur opposer : environ 150 soldats de garnison, une centaine de miliciens, un petit nombre de Canadiens et quelques flibustiers. Les Indiens, mal récompensés pour leur appui lors des sièges précédents et mécontents du bas prix qu’offraient les Français pour leurs castors, demeurèrent éloignés. Les Anglais débarquèrent des deux côtés de la rivière et Subercase, peu sûr de ses soldats, n’osa tenter aucune sortie parce qu'aucun ne serait revenu ! Les Anglais marchèrent aussitôt vers le fort, mais un vif tir d’artillerie bloqua leur avance. Ils durent se mettre à couvert, creuser des tranchées, dresser des batteries, bref, entreprendre un siège en règle. Au bout de quelques jours, ils réussirent à ériger une batterie à l’abri du feu français dans une dénivellation de terrain d’où ils canonnèrent le fort et une galiote y lança des bombes pendant plusieurs nuits. Ce bombardement produisit un effet désastreux sur le moral des assiégés. Charles de Saint-Étienne de La Tour fut gravement blessé et une bombe emporta un angle du magasin à poudre. Les habitants affolés demandèrent au gouverneur de se rendre et, le soir même, cinq soldats et 50 miliciens désertèrent. Le lendemain, Subercase convoqua un conseil d’officiers et tous émirent l’avis de capituler. De son côté, Nicholson envoya une sommation. Subercase, tout en refusant de reconnaître les prétendus droits contenus dans cette sommation, accepta le principe d’une reddition. Il y eut échange d’otages et de parlementaires; la capitulation fut négociée et signée le 13 octobre. Cette capitulation, assez libérale, accordait les honneurs de la guerre. Le gouverneur pouvait conserver six canons et deux mortiers selon son choix, les habitants, dans un rayon de trois milles, pouvaient garder leurs biens et demeurer à Port-Royal, en prêtant serment d’allégeance, sinon ils avaient deux ans pour se retirer. La garnison, comprenant 156 soldats, sortit tambour battant et drapeau au vent, traînant un petit mortier. L’honneur était sauf, mais le spectacle de ces soldats affamés et en guenilles, dont un bon nombre n’étaient que des adolescents, attrista les vainqueurs. En remettant les clefs du fort à Nicholson, Subercase exprima l’espoir de revenir lui rendre visite au printemps suivant ! Le colonel Vetch prit le commandement du fort avec une garnison de 450 hommes. La garnison française, les officiers civils et quelques familles formant un groupe d'un peu plus de 250 personnes s’embarquèrent pour la France sur trois navires et ils arrivèrent à Nantes le 1er décembre. Subercase, accusé de négligence par quelques officiers, blâmé par Vaudreuil et le ministre, fut traduit en conseil de guerre à Rochefort, mais il fut prestement acquitté. Au début de 1711, Pontchartrain, tardivement convaincu de l’importance de l’Acadie, esquissa de vagues projets pour reprendre Port-Royal. Dans ce dessein, il voulut envoyer Subercase servir à Québec sous les ordres de Vaudreuil, tout en lui conservant ses appointements de gouverneur. Mais Subercase dégoûté refusa. Deux ans plus tard, le Traité d’Utrecht cédait définitivement l’Acadie à l’Angleterre. Nous savons peu de choses sur les années qui suivirent le retour de Subercase en France. Il se retira du service et vécut dans ses terres du Béarn. En 1716, le ministre écrivit à Beauharnois de le consulter afin de préparer de nouveaux plans pour la reprise de l’Acadie. En 1719, il résidait à Jurançon, près de Pau. Il continuait de toucher une pension de capitaine de 600ª par an. Il mourut à Cannes dans l’Yonne le 20 novembre 1732. Une dalle funéraire y marque son tombeau, dans l’église de ce village. Il avait épousé Marie-Anne Du Bourget et il avait eu un fils pour lequel il demanda un brevet d’enseigne dans une lettre de 1707. Il avait aussi plusieurs neveux, dont l’un, dit le «chevalier de Subercase», servit quelque temps sous ses ordres à Plaisance, puis retourna en Béarn. Subercase fut le dernier et probablement le plus remarquable gouverneur de l’Acadie française. |
|
Dernière mise à jour : ( 22-02-2009 ) |
< Précédent | Suivant > |
---|