Plus favorisés que leurs confrères des deux autres provinces, les Acadiens du Nouveau-Brunswick sont distribués géographiquement de façon plus homogène. Ils occupent massivement les régions du Nord-Ouest, du Nord et de l'Est de la province, tandis que les Anglais se répartissent globalement dans le sud et l'ouest.
Malgré l'écrasante majorité dont ils jouissaient dans leur région, ce n'est que graduellement et assez timidement que les Acadiens éliront un des leurs pour les représenter à la législature provinciale. Les anglophones leur opposaient une résistance farouche, menaçant les candidats et terrifiant les électeurs. Dans plusieurs endroits, les bureaux de scrutin étaient saccagés par des fiers-à-bras, jusqu'à ce que les Acadiens, lassés de ces exactions, y mirent fin en assommant à coups de poing quelques-unes de ces équipes.
Les Acadiens de cette province n'avaient eu qu'un seul député jusqu'en 1871 où ils en élirent quatre, mais trois seulement en 1874 et 1879, quatre en 1882, et encore trois en 1886, puis huit en 1899, dix en 1917, treize en 1948, quatorze en 1956, quinze en 1960 et seize en 1963.
Le premier Acadien à faire partie du Cabinet provincial fut Lévite Thériault du Madawaska en 1870. Ce n'est qu'en 1912 qu'on en nomma un deuxième. Ce fut le nombre approximatif de ministres acadiens à siéger au Cabinet jusqu'à l'avènement de Louis-J. Robichaud à titre de premier ministre de la Province en 1960.
Si la députation acadienne et sa représentation au Cabinet furent toujours inférieures à la proportion numérique des Acadiens dans la province, quelques-uns des leurs cependant y ont joué un rôle marquant.
Pierre-Amand Landry (fils de Amand Landry), qui fut ministre des Travaux publics de 1878 à 1882 et secrétaire provincial ensuite, exerça une grande influence au Parlement. En 1882 on disait qu'il aurait succédé comme premier ministre à John J. Fraser démissionnaire, mais il aurait jugé que le temps n'était pas encore venu pour faire accepter un Acadien à ce poste par la majorité anglophone. Il laissa le champ libre à Daniel L. Harrington et l'appuya fortement. Grâce à ses qualités exceptionnelles, il devint l'âme dirigeante et l'éminence grise du Parlement provincial.
Pierre Véniot devint premier ministre de la Province en 1923, en succédant sans élection à son prédécesseur Walter É. Foster. Aux élections de 1925, son parti fut défait.
Certains autres Acadiens, tel Gaspard Boucher, ont joué un rôle souvent discret, mais important.
En 1960, Louis-J. Robichaud, député de Kent, fut élu premier ministre de la Province. Les députés acadiens constituaient près de la moitié du gouvernement libéral élu. Louis-J. Robichaud tint compte de ce fait et pour la première fois dans l'histoire de la province, les Acadiens étaient représentés par six des leurs au Cabinet provincial, dont le premier ministre.
Comme nous le verrons plus loin, le règne de Robichaud (1960-1970) a marqué la province en profondeur et corrigé plusieurs d'injustices commises à l'endroit des Acadiens.
Au fédéral, les Acadiens réussirent à faire élire un des leurs dès 1867. C'était Auguste Renaud qui se présenta dans le comté de Kent. C'est lui qui conjointement avec Costigan mena la lutte au fédéral contre la loi scolaire de 1871.
Comme au niveau provincial, les Acadiens osèrent présenter des candidats et les élire â la Chambre des Communes d'Ottawa très lentemment et de manière graduelle. Aujourd'hui, les quatre comtés à majorité française sont représentés par des Acadiens.
En 1926, Pierre Véniot fut le premier Acadien à accéder au Cabinet fédéral et il devint ministre des Postes. Il fut l'instigateur de l'émission de timbres bilingues au Canada. Depuis lors, les Acadiens ont habituellement un représentant au Cabinet fédéral. Roméo LeBlanc, ministre des Pêcheries, y fait présentement excellente figure.
Le premier Acadien de cette province à accéder au Sénat canadien fut Pascal Poirier en 1885. Un deuxième fut nommé en 1917 et un troisième en 1922. Et depuis lors, trois Acadiens de cette province siègent habituellement au sénat.
Source :
Petit manuel d'histoire d'Acadie, Les Acadiens de 1867 à 1976, Librairie Acadienne, Université de Moncton, Père Anselme Chiasson, 1976
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